Si sa maladie génétique l’a empêché de dépasser la taille d’1,52 mètre, Henri de Toulouse-Lautrec, né à Albi en 1864, a usé de son art pour regarder son époque dans les yeux, devenant l’un des peintres les plus importants du XIXème siècle, croquant son époque avec des scènes de vie bien connues, en immersion au sein de cafés et de cabarets montmartrois, mais aussi avec de stupéfiants portraits, isolant de tout contexte festif les visages tantôt vifs, tantôt mélancoliques, du Paris de la fin du XIXème siècle.

Henri de Toulouse-Lautrec était connu pour son esprit gai, ses nuits passées à festoyer au Moulin Rouge, sa fréquentation assidue des prostituées… Pourtant, et malgré sa vie très courte – il est mort à 36 ans –, son œuvre est riche et abondante : on dénombre pas moins de 737 peintures, 275 aquarelles, 369 lithographies et plus de 5000 dessins ! Œuvres qui inspireront longtemps après sa mort en 1901 les artistes et les créateurs qui marquèrent la première moitié du XXème siècle, Picasso en tête.

Peintre mais aussi illustrateur au temps de la publicité naissante, de nombreuses affiches de Toulouse-Lautrec illustrent ses collaborations avec différentes institutions parisiennes, comme le célèbre portrait d’Aristide Bruant dans son cabaret (1892), le Moulin Rouge (1891), le Divan Japonais (1892), mais aussi sa publicité pour l’Artisan moderne (1894) et même, plus surprenant, son travail autour de cyclistes pour La Chaîne Simpson (1896).

Bien avant cela, Henri adolescent fit son premier apprentissage auprès du peintre animalier René Princeteau (1843-1914) spécialisé dans les sujets équestres brossés d’une facture alerte. Le jeune élève cultiva auprès de ce maître cette agilité de brosse qui traduit si bien la sensation de vitesse et de légèreté caractéristique de son style. Il multiplia alors les études d’attelage au galop à Chantilly, à Auteuil et à Nice en s’inspirant de la gravure anglaise et des lithographies de Dreux.

Puis Toulouse-Lautrec vint à Paris et s’intéressa aux femmes, saisissant leurs moments d’intimité, comme Edgar Degas dont il était admirateur, les représentant vulnérables, livrées à elles-mêmes, avec une tendresse que peu d’hommes égalaient alors. Il s’est montré attentif à tous les corps, y compris les femmes vieillissantes, mélancoliques, les danseuses, les comédiennes, les prostituées et même les femmes de cirque, comme sur ce dessin conservé au Petit Palais, Jeune acrobate dans l’arène (vers 1899).

Toulouse-Lautrec n’était pas beau. Tout petit, le torse long et les jambes minuscules, il avait un gros nez et des lèvres charnues, et zézayait. Il compensait cette infirmité physique par un excellent caractère, une humeur joyeuse et un grand sens de l’autodérision. C’est pourquoi il adorait prendre la pose et jouer avec cette nouveauté qu’était alors la photographie. Il se déguise en femme, en empereur japonais, en clown, se déshabille volontiers, donnant à sa courte vie un air de fête permanente.

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